Quand le PDG de TotalEnergies ne sait plus compter
En stigmatisant le taux d’imposition en France, Patrick Pouyanné oublie, avec une mauvaise foi presque déconcertante, les avantages apportés par l’État français, qui lui évitent des dépenses massives. Le tout pour faire pression sur les politiques et manipuler l’opinion publique.
Il y a des phrases qui claquent fort, qui intimident et qui semblent peser lourd dans un débat public déjà saturé de postures. Et puis il y a celles qui ne tiennent pas deux secondes lorsqu’on les regarde sérieusement. La sortie de Patrick Pouyanné, PDG de TotalEnergies, affirmant qu’il paierait 25 % d’impôts ailleurs contre 35 % en France, et que cela déterminerait l’implantation de ses investissements, relève clairement de cette seconde catégorie. C’est une comparaison sans aucun sens, un raccourci conçu pour faire pression sur le gouvernement plus que pour décrire la réalité économique.
Car non, on ne choisit pas un pays juste sur son taux d’imposition. Lorsque l’on évoque les « coûts » pour une multinationale, il faut regarder l’ensemble. Tout l’ensemble.
Ce que Patrick Pouyanné « oublie » dans sa comparaison
Oui, les cotisations sociales sont plus faibles aux États-Unis qu’en France. Mais dans les faits, cela signifie surtout qu’une entreprise américaine doit financer l’assurance maladie de ses salariés, un poste gigantesque. Pour une grande entreprise, la facture santé dépasse souvent ce que paient les entreprises françaises en cotisations sociales obligatoires. Le « paradis » fiscal américain devient soudain beaucoup moins idyllique lorsque l’on comptabilise vraiment tout.
En France, la protection sociale est un avantage économique direct pour les entreprises : l’État finance l’école, les universités, la formation professionnelle, les infrastructures, la santé. Un salarié français arrive déjà formé, soigné, protégé et ne doit pas passer une bonne partie de son salaire dans l’éducation de ses enfants. Autant d’investissements massifs qui ne sortent pas du budget des entreprises.
Un autre détail passé sous silence : 90 milliards d’exonérations
Lorsqu’il compare simplement « 25 % » et « 35 % », Patrick Pouyanné omet aussi un élément central : la France distribue chaque année plus de 90 milliards d’euros d’exonérations et d’allègements aux entreprises. Quand on ajoute à cela les crédits d’impôts, les subventions, les dispositifs sur mesure, l’image d’un pays qui « pénaliserait » les grandes entreprises s’évapore instantanément.
La France n’est pas un désert fiscal ; c’est un pays qui déroule un tapis rouge permanent pour attirer ou conserver les sièges des multinationales. TotalEnergies en sait quelque chose.
L’impôt ne détermine jamais seul les investissements
Les investissements se font selon une multitude de facteurs : infrastructures, stabilité politique, disponibilité énergétique, qualité de la formation, sécurité juridique, productivité, marché local… L’impôt sur les bénéfices est un paramètre parmi des dizaines.
S’il suffisait de baisser l’impôt pour attirer des entreprises, le Luxembourg, l’Irlande et les îles Caïmans seraient les premières puissances industrielles du monde. Ce n’est pas le cas, et Patrick Pouyanné le sait parfaitement.
Un argument uniquement idéologique
Ce genre de petite phrase n’a pas vocation à être vraie, elle a vocation à être efficace. Elle sert une idéologie : celle de la baisse permanente de la fiscalité des grandes entreprises, quel qu’en soit le coût pour la collectivité. Elle oublie la protection sociale. Elle oublie les infrastructures publiques. Elle oublie les services financés par l’impôt. Elle oublie les 90 milliards d’exonérations.
Elle n’oublie qu’une seule chose, en réalité : la vérité économique.
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