Mercosur : l’Europe passe en force, la France trahit la terre et les hommes
On nous l’avait pourtant promis : la France serait ferme, intraitable, inflexible face au traité de libre-échange entre l’Union européenne et le Mercosur. Emmanuel Macron jurait qu’il n’était pas question de signer un accord qui piétine à ce point nos normes sociales et environnementales. Et pourtant, Ursula von der Leyen vient d’acter le passage en force. Comme souvent à Bruxelles, on tente d’imposer le fait accompli en comptant sur l’apathie des opinions publiques et le double langage des gouvernements.
Alors, que fait la France ? Elle s’indigne mollement. Elle « exprime des réserves », « rappelle ses inquiétudes », « demande des garanties ». Mais quand il s’agit de taper du poing sur la table, silence radio. Quand il faudrait brandir le veto, on se contente de hausser les sourcils. Le Conseil de l’Europe a donc décidé contre l’avis de Paris et cela pose une question vertigineuse : sommes-nous encore souverains dans l’Union ou bien notre opposition n’était-elle qu’une mascarade diplomatique, une posture de façade ? La réponse tient dans une phrase du ministre du commerce extérieur, Laurent Saint-Martin, sur son compte X :« Le texte présenté par la Commission va dans le bon sens, celui que nous défendons ».
Car enfin, de quoi parle-t-on ? D’un accord qui mettrait sur un même marché des agriculteurs européens déjà étranglés par la concurrence mondiale et des producteurs sud-américains autorisés à utiliser des pesticides interdits chez nous depuis vingt ans. On appelle ça « concurrence déloyale », mais dans les faits, c’est un massacre annoncé. Les vaches brésiliennes nourries au soja transgénique et aspergé de glyphosate finiront dans nos assiettes, pendant que nos agriculture, eux, fermeront boutique à la chaîne.Il y a bien sûr les soit-disant garde-fous, avec des produits qui devront respecter les normes sanitaires et phytosanitaires européennes. Mais dans les faits, ils ne seront jamais contrôlés.
Et ne parlons même pas de l’aberration écologique : importer des tonnes de viande, de sucre ou de volaille, en les transportant sur 10 000 kilomètres quand la planète brûle et que chaque gramme de CO₂ compte, relève du sabotage pur et simple. On nous bassine avec la « transition verte », mais Bruxelles déroule le tapis rouge à l’agrobusiness du bout du monde. C’est tout le génie du néolibéralisme : parler d’écologie en signant des accords qui détruisent le climat.
La gauche radicale comme les écologistes tirent la sonnette d’alarme depuis des années. Les Amis de la Terre, Attac, Greenpeace, la Confédération paysanne, tous dénoncent un projet qui écrase les paysans, abîme la biodiversité et nous rend complices de la déforestation de l’Amazonie. Mais à Bruxelles, les lobbys dictent l’agenda. À Paris, on s’incline en espérant sauver les apparences.
Il serait temps de sortir de cette schizophrénie. Si l’on veut réellement protéger nos terres, nos paysans et notre climat, alors il faut rompre avec cette logique d’import-export insensée. L’agriculture du futur ne se fera pas dans les cargos frigorifiques traversant l’Atlantique. Elle se fera dans nos champs, avec une production de saison, des circuits courts, des fruits et légumes qui poussent pour nourrir celles et ceux qui vivent à proximité.
L’heure est venue de dire non, clairement et définitivement, à l’Europe du Mercosur. Sinon, il faudra arrêter de parler de souveraineté et de transition écologique : ces mots auront définitivement perdu tout leur sens.
(Photo @Rob – CC)
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