Otan en emporte l’armement
Ils ont beau le haïr, un peu comme on le fait avec la brute de l’école, ils ont tous préféré se coucher plutôt que s’allier pour faire face aux exigences de Donald Trump. Au sortir du sommet de l’Otan, le plus puissant VRP du monde pouvait se frotter les mains. Il a réussi à imposer aux membres de l’alliance, à l’exception notable de l’Espagne, une augmentation très sensible de leurs dépenses militaires. Tout en sachant que son pays, de très loin le premier producteur de machines de mort au monde, serait le grand gagnant de ce coup de maître économique. Car il s’agit bien de cela. Point de stratégie géopolitique dans la volonté de Trump d’armer l’Europe, juste un énorme chantage qui va rapporter des centaines de milliards aux industries américaines.
Qu’il semble loin déjà le temps où politiques et commentateurs tapaient du poing sur la table : cette fois, on s’affranchit, on va réellement créer une défense européenne. Il est vrai que les pays européens n’en menaient alors pas large en découvrant que les velléités expansionnistes de Poutine ne semblaient plus concerner le « grand frère » américain. Ou du moins seulement par intermittence, et sans nécessairement faire cause commune.
L‘Otan, l’Europe de la défense, la hausse conséquente des budgets militaires chez nous : tout le monde, y compris une large part de l’opinion publique, est désormais persuadé que l’on ne peut plus faire autrement si l’on espère faire face à un monde aussi instable. Personne ne semble se dire que c’est peut-être cette course folle à l’armement, ressemblant de plus en plus à un concours de culturistes, qui fait planer le plus grand danger sur nos têtes. On le voit, n’importe quel pays, y compris le mieux armé au monde, peut tomber dans les mains d’un fou furieux. Est-on sûr que ce sera mieux demain avec l’Europe, alors que plusieurs nations ont déjà fait le choix du repli sur soi et de la haine de l’autre ? Une impasse que pourraient d’ailleurs aussi choisir les électeurs français en 2027.
Le leurre nucléaire
Pendant plusieurs décennies, nous nous sommes crus définitivement à l’abri grâce à la dissuasion nucléaire. Personne ne serait assez fou pour attaquer un État qui détient la bombe. Et cela tombait bien, les plus grandes puissances la possèdent toutes. Alors peut-on vraiment blâmer les plus petits pays qui cherchent à se la procurer, à se créer le bouclier ultime ? Et s’ils n’y arrivaient pas, qui serait là pour les défendre ?
En fait, pour que tout le monde puisse se sentir en sécurité, il faudrait une instance internationale. Un interlocuteur unique en cas de conflit qui dispose d’importants moyens pour s’interposer, si besoin, le temps de trouver un accord pour le régler. Une instance qui ressemblerait comme deux gouttes d’eau à l’ONU, mais sans droit de veto et après une réforme majeure de son fonctionnement.
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Et si cette avancée majeure pour la paix dans le monde arrivait enfin, peut-être que nous arrêterions d’entendre, dans un même flash d’actualité, que l’on va tripler à terme les dépenses d’armement, tout en baissant les remboursements de la Sécu et en remettant en question l’âge de départ à la retraite qui n’est plus jugé « raisonnable ».
Ce qu’il y a de plus fou dans toute cette histoire, c’est que ce sont les va-t’en guerre qui passent pour les plus raisonnables. Ceux qui pensent que l’argent devrait plutôt être massivement investi dans le bien-être des hommes et de l’environnement sont, par les temps qui courent, des inconséquents. Pas sûr que l’Histoire avec un grand H ait dans quelques dizaines d’années la même vision des choses. À condition bien sûr que l’on ait encore tout ce temps devant nous.