Loi Duplomb, transition énergétique, trafics de déchets, entreprises en mutation et nouvelles sociabilités numériques au menu de la semaine
Loi Duplomb : une pétition record fait irruption à l’Assemblée
Pour la première fois sous la Ve République, une pétition citoyenne, 2,13 millions de signatures contre la loi Duplomb, donnera lieu à un débat en séance publique le 7 janvier 2026. Vert décrypte son déroulement. Le cadre est strict : une demi-journée, pas de vote et une discussion centrée sur les alertes de la pétition plutôt que sur la loi elle-même, qui « simplifie » en réalité des normes environnementales clés (méga-bassines, élevages industriels, pesticides). Le risque est double : un débat tardif, focalisé sur les seuls néonicotinoïdes, et une récupération politique, notamment par l’extrême droite, tandis que la question démocratique de fond, comment une loi agricole aussi lourde de conséquences a pu passer sans débat dans l’hémicycle, reste brûlante. Ce moment dira beaucoup de la manière dont la représentation nationale prend au sérieux les alertes écologiques.
Climat : quand le TGV chinois fait mieux que la voiture électrique
En s’appuyant sur le dernier World Energy Outlook de l’Agence internationale de l’énergie, dans Le Monde, Jean-Baptiste Fressoz, historien et chercheur au CNRS, rappelle un fait dérangeant pour le récit dominant de la transition : ce ne sont pas les voitures électriques qui ont le plus réduit la consommation de pétrole, mais le TGV chinois, qui aurait permis d’économiser en 2024 l’équivalent de 1,5 million de barils par jour, davantage que l’ensemble du parc de véhicules électriques mondial. Le renouvellement très lent du parc automobile, l’exportation des vieux véhicules vers les pays pauvres et la masse croissante des voitures limitent fortement les gains climatiques de l’électromobilité, là où le rail divise par cent les émissions par rapport à la voiture essence et par quatre-vingt par rapport à l’avion. Derrière les chiffres, une critique politique : tant que l’on préfère l’innovation glamour aux infrastructures sobres, on passe à côté des leviers les plus efficaces de la transition.
Déchets électroniques : nos vieux frigos financent une économie mafieuse
Reporterre nous plonge dans « la criminalité environnementale ». Un quart des déchets d’équipements électriques et électroniques, et la moitié des réfrigérateurs, échappent en France à la filière agréée pour rejoindre des circuits parallèles très lucratifs. Vols en déchetterie, pseudo-ferrailleurs, conteneurs maquillés en déménagements : les réseaux détournent ce « gisement » vers l’Asie du Sud-Est et l’Afrique, en dépit de l’interdiction d’exporter ces déchets hors UE et OCDE. Métaux précieux pour les trafiquants, mais cocktail toxique pour les populations et les écosystèmes qui les reçoivent, où les appareils sont démontés sans protection, souvent par des enfants. Malgré un arsenal juridique théoriquement dissuasif, le manque de contrôles et la porosité des frontières intérieures européennes rendent ces trafics très rentables, au niveau du commerce de drogue selon Interpol. Ce scandale silencieux rappelle que l’économie circulaire ne vaut que si elle ne repose pas sur le sacrifice environnemental et sanitaire des pays du Sud.
Entreprises en mutation : l’art de créer des « branches » avant la rupture
La Relève et la Peste met un coup de projecteur sur « Éclaireurs ». Dans leur documentaire, Arthur Gosset et Hélène Cloître quittent le récit des « bifurcations » individuelles pour chroniquer celles et ceux qui tentent de transformer leur travail de l’intérieur. On y suit une responsable de laboratoire cosmétique qui, lucide sur l’absurdité d’un modèle basé sur des crèmes composées à 70 % d’eau dans du plastique, réoriente son activité vers des services de proximité, ou encore une salariée de Leroy Merlin qui se bat pour installer des systèmes de location dans la grande distribution du bricolage. Autour de la métaphore des « branches mortes », le film montre comment certaines structures inventent de nouvelles activités avant que leur modèle ne s’effondre, en assumant la sobriété plutôt que la croissance infinie. Derrière ces pionniers, se dessine une question profondément politique : laisserons-nous quelques TPE/PME isolées inventer la suite, ou mettra-t-on enfin le droit, la fiscalité et la protection sociale au service de ces bascules collectives ?
Twitch : un refuge identitaire… sous haute tension éthique
The Conversation revient sur le rôle ambivalent des plateformes de streaming dans la vie des jeunes adultes, à partir d’une étude menée sur Twitch. Loin d’être seulement une fabrique d’addictions, la plateforme apparaît comme un espace de socialisation intense où passions marginalisées, discussions politiques, questions de genre ou de santé mentale deviennent des ressources pour se construire. Pour beaucoup, ces « bulles sociales » modérées fonctionnent comme des safe spaces accessibles à tout moment, où la présence du streamer, figure d’identification autant qu’ami imaginaire, aide à rompre la solitude et à expérimenter différentes versions de soi. Mais la mort en direct de Jean Pormanove sur Kick rappelle brutalement ce qui se joue lorsque ces dynamiques se déploient sans garde-fous : la communauté se transforme en chambre d’écho de violences et d’humiliations. L’enjeu n’est plus de diaboliser ou d’idéaliser ces espaces, mais d’inventer une véritable régulation démocratique du numérique, à la hauteur de leur rôle social.
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