Lettre au Père Noël
Cher Père Noël,
On hésite toujours, à notre âge, à t’écrire.
Parce qu’on sait bien que le traîneau est souvent cloué au sol par les vents dominants du marché, que les lutins ont été externalisés, et que la magie se négocie désormais en parts de marché.
Mais cette année, on tente quand même.
Pas pour demander une trottinette électrique ou un énième gadget connecté.
Non. Pour des choses beaucoup plus irréalistes.
On aimerait, par exemple, une information qui ne confonde plus vitesse et précipitation, polémique et débat, opinion et fait. Une information qui prenne le temps d’expliquer, de contextualiser, de douter parfois. Une information qui considère ses lecteurs comme des citoyens, pas comme des cibles publicitaires à capter entre deux scrolls.
Si tu peux aussi glisser sous le sapin quelques médias indépendants encore debout, ce serait appréciable. Pas forcément riches. Juste vivants. Capables de payer leurs journalistes, de résister aux pressions politiques, économiques ou idéologiques, et de refuser les éditoriaux dictés par des intérêts qui n’ont rien de général.
On ne serait pas contre, non plus, un petit miracle social. Rien d’extravagant : moins d’inégalités qui explosent dès la naissance, un système de santé qui soigne sans trier, une école qui émancipe au lieu de classer. Et tant qu’à faire, une planète qui arrête de brûler pendant que certains expliquent que c’est bon pour la croissance.
On sait, la liste est longue.
Mais tu es Père Noël, après tout.
À défaut, si ton stock est limité, on acceptera aussi quelque chose de plus modeste : des lectrices et des lecteurs curieux, exigeants, prêts à soutenir une autre idée de l’information. Des gens qui comprennent que l’indépendance n’est jamais gratuite, mais qu’elle est toujours précieuse.
Ici, on continuera à faire notre part. À enquêter, à décrypter, à déranger parfois. À refuser les évidences toutes faites et les solutions paresseuses. À croire, malgré tout, qu’un autre récit est possible.
Si tu passes par là, dépose juste un peu de lucidité, de solidarité et de courage collectif.
Le reste, on s’en chargera.
Joyeux Noël, quand même.
Le Nouveau Paradigme
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